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6 mai 2009 3 06 /05 /mai /2009 08:19

. Parlons un peu de l’aventure MAD MOVIES, que vous avez rejoint au numéro 10. Récemment Jean Pierre Putters vous a tiré un vibrant coup de chapeau. Quels sont vos souvenirs marquants ?

 

. J’ai rencontré Jean Pierre alors que j’effectuais un stage de fin d’études de documentation à la Cinémathèque Française. Comme le stage était moins intéressant que prévu, j’ai dû envisager de faire un mémoire plutôt qu’un rapport de stage ; et comme j’étais « en plein dedans » j’ai proposé comme sujet : les fanzines. Pour cela j’ai contacté de nombreux fanéditeurs et j’ai rencontré Jean Paul Nail de VAMPIRELLA et Jean Pierre qui habitait Champigny sur Marne à l’époque. L’entretien s’est très bien passé et nous sommes restés en contact par la suite, par courrier, lors des festivals organisés par L’ECRAN FANTASTIQUE ou à l’occasion de déplacements à Paris. Début des années 80, j’ai travaillé un an et demi à Paris et là on a eut l’occasion de se voir beaucoup. Je crois qu’on a sympathisé tout de suite. A la base je pense que, outre notre passion pour le cinéma fantastique, on s’est aperçus que les mêmes choses nous faisaient rire. On se surprenait souvent à penser la même chose au même moment en réaction à un évènement ou une remarque. Et quand j’ai eu envie de passer au stade de l’écriture, ça s’est fait tout naturellement et avec les encouragements du « Rédac’ chef ». Le ton que Jean Pierre a donné à MAD MOVIES dès le départ, permettait de traiter sérieusement de n’importe quel sujet en ne se prenant pas au sérieux pour autant. A l’époque c’était tout simple : « Tiens, j’aimerais faire un article sur tel sujet » ; « O.K. pas de problème, vas-y » et comme on était moins tributaire de l’actualité, on faisait vraiment ce dont on avait envie. MAD a commencé à se structurer vraiment après le numéro 20. En ce qui me concerne, comme je n’étais pas sur Paris, que j’avais un boulot, ma collaboration bien que régulière restait un peu « en marge » et pas forcément mentionnée. J’ai tenu la rubrique vidéo un moment, les « adieux » aux personnalités décédées, des articles de fond sur Stephen King, Superman, etc et des visites de tournages ou j’étais invité (HELLRAISER 2 & NIGHTBREED)…

 J’aimais bien surtout rédiger des « Notules lunaires » car en quelques lignes et avec une information très limitée, parfois même seulement une illustration, il fallait broder un petit texte rigolo. Là ça tournait parfois au ping-pong avec Jean Pierre qui rajoutait souvent son grain de sel ou plus… Je me souviens notamment de la notule sur un film dont le héros s’appelait « Tor » et que se concluait par « et c’est ici que la notule se termine… à tort ! » ; ce qui a provoqué l’ajout complémentaire des tas de jeux de mots sur le même schéma. Cette façon de faire très conviviale a permis une complicité grandissante avec les lecteurs ; de même lorsqu’il racontait de façon délirante la vie supposée des rédacteurs dans « 4, rue Mansart ». Sur la fin, il nous arrivait même de faire des notules qui ne parlaient pas de cinéma ; uniquement pour se faire marrer. C’est dans cet esprit qu’il a lancé la « Mad Rubrik » qui lui permettait de parler de tas de trucs différents toujours sous l’angle de la « déconne » et il m’est arrivé de lui fournir de la matière. Mais comme je ne participais pas aux réunions de rédaction, c’était en discutant au téléphone que je proposais des choses où qu’il m’en demandait.

 

Le gros avantage de faire partie de la rédaction de MAD MOVIES c’est que ça permettait d’avoir des invitations aux festivals, de récolter du matériel publicitaire pour publication, de rencontrer des tas de gens. Notamment la plupart des fanéditeurs de l’époque : le cher Alain Petit (LE MASQUE DE LA MEDUSE) un passionné tout azimut à l’enthousiasme communicatif et un gouffre de connaissances, le regretté Pierre Charles avec qui j’ai fait mon premier marché du film à Cannes et dont le CINE ZINE ZONE constitue une somme inégalée sur les cinémas italiens et espagnols notamment, le prolifique Norbert Moutier toujours d’attaque, mon vieux camarade Suisse Hans Furrer (VAMPIR), Marc Toullec avec qui je suis toujours en contact et tous les autres croisés à la librairie de Jean Pierre MOVIES 2000 où au détour d’un festival : Pierre Pattin, Christophe Gans, Christophe Lemaire, François Cognard, … même si on ne se fréquentait pas régulièrement, on avait du plaisir à se croiser régulièrement… moi du moins ! Après mon retour en Bretagne en 1980, j’ai rencontré Eric Summer, qui avait fait une pub monstrueuse sur une radio locale pour THE BAT, et m’a fait participer à ses projets (et il en avait le bougre !) dont la publication de la revue TRAVELLING, qui a été une chouette aventure ou on s’est bien marré. Plus récemment, mais ça doit faire quand même plus de 15 ans, j’ai sympathisé avec Fabrice Lambot avec lequel on a passé un temps fou au téléphone au moment ou il débutait ATOMOVISION et que je n’ai rencontré que 10 ans plus tard…

 

. Concevoir et fabriquer un fanzine ou une revue à l’époque ne devait pas être de la tarte ; qu’elles étaient les principales difficultés ?

 

. Je pense que faire un fanzine correspondait à quelque chose comme une « carte de visite » destinée à ceux qui partageaient les mêmes passions et ç’est pour cela que les zines qui ont dépassé les 3 ou 4 numéros sont rares. Les fanéditeurs ont été recueillis par les publications qui avaient une vision à plus long terme comme MAD MOVIES, STARFIX, L’ECRAN FANTASTIQUE ou CINE ZINE ZONE. Les moyens techniques étaient plus rudimentaires à l’époque et certains zines ont été tirés avec la technique de la ronéo (les premiers MAD d’ailleurs) qui était très peu chère mais également très embêtante d’utilisation et très sale. La plupart ont été faits en photocopie, avec les différences de qualité que ça implique mais qui facilitait l’ajout d’illustrations, notamment les pavés de presse qui ornaient les pages cinéma des journaux. Après, il fallait aller à la pèche dans les revues étrangères ou traîner dans les quelques boutiques spécialisées en cinéma de Paris pour tenter de trouver des photos ou des dossiers de presse toujours précieux. Le côté « distribution » était le plus embêtant ; quelques librairies acceptaient les fanzines mais ne les mettaient pas forcément en valeur et quand on y retournait quelques mois plus tard impossible de mettre la main sur les invendus et donc de se faire payer ! Ca fonctionnait mieux en échange de pub entre zines. A l’époque, un titre qui « marchait bien » vendait dans les 200 / 250 exemplaires.

 

. Comment étiez-vous considérés par les autres revues de cinéma et les critiques ?

 

. Au départ si je me souviens bien il y avait quand même un peu de condescendance envers une revue qui ne craignait pas les couvertures choc, les sujets en marge et parler de films que les autres évoquaient à peine ; tout cela avec un ton pas très orthodoxe. De plus, par le choix de Jean Pierre Putters d’assumer tous les risques en finançant personnellement la revue, elle ne dépendait pas de ressources publicitaires aléatoires. Cela permettait aussi d’avoir de la distance par rapport aux attachés de presse qui n’avaient pas de prise pour tenter d’obtenir une couverture ou un certain nombre de pages sur « leur » film. La gestion de MAD MOVIES par Jean Pierre a été exemplaire car il savait ce qu’il voulait en faire et l’a très bien fait. Je n’oublie pas le temps qu’il y a consacré ; il a une énorme force de travail qui me rend admiratif.

 

. Quel est votre sentiment sur la forme actuelle, le contenu et le style du MAD MOVIES « nouvelle génération » ?

 

. J’achète MAD MOVIES tous les mois (mais je m’y perd avec toutes les formules !) et le fait d’y avoir ajouté un DVD me réjouit car leur sélection est en général intéressante, alternant classiques et nouveautés. Au niveau des choix éditoriaux, ils ont le courage de leurs opinions et ça me semble très « Mad » d’esprit de mettre en couverture des films auxquels ils croient et qui risquent de ne pas trouver leur clientèle. Le revers c’est le risque que les lecteurs ne soient pas d’accord avec leurs choix. A titre personnel, je dois dire que je ne suis pas du tout fan des films comme SAW, HOSTEL, MARTYRS… et autres films très violents et souvent ultra complaisants qui s’amalgament, à tort, au genre fantastique. Ca n’est pas nouveau, je me rappelle avoir été très dérangé par la première projection de LAST HOUSE ON THE LEFT au festival du Berlitz alors que HILLS HAVE EYES introduisait une distance par rapport à un sujet quelque peu similaire. Sinon, je trouve les « notules » trop longues et parfois « limites» lorsque l’humour insiste sur le scato, le macho… c’est une question de dosage. Mais pour l’avoir fait, je sais qu’il est à la longue difficile de trouver des accroches nouvelles et de se renouveler. Le interviews carrières sont intéressantes et souvent pointues. Je lis avec plaisir la rubrique Vidéo, les portraits des légendes du fantastique brossés par Toullec et bien sur le « Fantastic Guide » toujours très informatif et à pleurer de rire !

 

. Enfin, une ultime question, êtes vous fan de Jésus Franco qui bénéficie depuis les années 70 d’une forte aura et qui séduit de nouvelles générations de cinéphiles ?

 

. J’aime bien certains films de Franco comme L’HORRIBLE DOCTEUR ORLOFF, LES NUITS DE DRACULA, JACK L’EVENTREUR…  plutôt son début de carrière. Depuis, j’ai un peu décroché et je crois que je ne lui ai pas pardonné d’avoir « subi » une projection de LA FILLE DE DRACULA à une séance de minuit, qui m’a littéralement achevé. En fait, je pense que la personne ou plutôt le personnage Jésus Franco est souvent plus passionnant que ses réalisations ; de l’entendre parler de ses films donne envie de les voir, du moins dans la version qu’il en a dans sa tête. Je ne l’ai croisé qu’une fois à Cannes ou il donnait une conférence de presse mais pour ceux qui l’ont fréquenté (comme son ami Alain Petit) il fascine beaucoup par ses diverses facettes : charme, roublardise, intelligence, culot, enthousiasme, mythomanie… bref un être très complexe et attachant par son besoin compulsif de tourner.



Merci beaucoup Mr Burel pour cette interview fort intéressante !
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commentaires

Y
Moi aussi j'ai bien aimé cette interview de Marcel Burel.<br /> Il a des choses intéressantes à dire et son style est excellent.<br /> <br /> Il me fait d'ailleurs regretter l'équipe actuelle de Mad Movies, composée en majorité de nerds qui ont des avis tranchés sur tout et qui semblent tout connaître et tout maîtrisé sur le cinéma (alors que...). <br /> <br /> Le plus ridicule s'avère être les jeux de mots puérils et les allusions sexuelles franchement minables.<br /> <br /> Bref, j'ai arrêté la lecture et l'achat de Mad depuis un bon moment déjà mais cette parenthèse de Marcel Burel me fait regretter cet ancien temps. Bravo !
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P
Marcel Burel était en effet un des très bons rédacteurs de Mad Movies première génération. <br /> Ses articles était assez bon et, manifestement, il n'a pas perdu la main puisque ses réponses sont fort intéressantes.<br /> Une fort bonne interview ne déparre pas au milieu de tes articles toujours de haut niveau.<br /> Bravo et encore !
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F
Chouette interveiw qui m'a rappelé la bonne époque où j'étais lecteur de MM.
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