1ère partie
Neal Adams est un grand, un très très grand du comics. Il est à la base un dessinateur d’excellence qui révolutionna la vénérable Dc comics, dans une période où elle perdait de son attrait par rapport à la sémillante Marvel comics. Mais son caractère, son engagement et son bagout lui ont conféré une aura supplémentaire.
A ce stade, son art est déjà accompli, en fait il est même au summum de son talent. Pourtant, il ne convainc pas d’office les éditeurs qui sont un peu plus lents que les lecteurs (alors qu’ils devraient avoir un temps d’avance, mais bon). Il enchaîne donc sur Batman, ou plutôt dans la série nommée the Brave & the Bold où notre justicier fait équipe chaque arc avec un nouvel associé. La réaction du public est excellente et Julius Swartz se voit contraindre de confier le titre Batman au jeune prodige, qui fait équipe avec Denny O’Neil, transfuge talentueux de la Charlton, sur le titre. Ce sera une ère d’excellence, enfin quelque chose de long et durable, de trépident qui se passe dans un titre de la firme. Rappelons que Marvel a quasiment le monopole des comics hype. Dc vient enfin de marquer un point. Batman est enfin débarré du traitement un brin niais hérité de la série télé. Ra’s Gulh est crée, Double face fait un retour remarqué, le Joker redevient réellement tordu et dangereux. Neal Adams crée Man-Bat lors du 400ème épisode du titre, et c’est une réussite. Bref, le Batman des années 60’, en comics, est celui de Denny O’Neil et Neal Adams.
Puis Neal Adams est sollicité de toute part à Dc, il est capable de susciter un engouement aussi il peut choisir. Il fera de courts mais excellents épisodes de Deadman. Même aujourd’hui, il s’agit de chef d’œuvre incontournable tant au point de vue de l’histoire que de la performance graphique de Neal. Je vous les recommande plus que vivement.
Il réalise une seconde performance d’intérêt au moins égale, sur le personnage du Spectre, qui n’est pas aussi puissant que maintenant, mais qui demeure diablement intéressant. Sa dépendance à Jim Corrigan est forte, sa puissance conditionnée et ses ennemis machiavéliques. Encore une fois, il s’agit d’un joyau de Dc mais la participation de Neal Adams reste très limité (quelques numéros !).
Sa principale performance viendra sur le titre Green arrow/Green Lantern qui se vend mal. Avec Denny O’Neil, il révolutionne le titre, mais aussi les comics grâce à un contenu mature qui aborde enfin des thèmes longtemps éludés par les comics (le legs de Frédéric Wertham et du comics code). Les personnages évoluent enfin dans un vrai monde, le notre avec les problèmes de drogues, les entrepreneurs véreux et au-dessus de lois.
Il s’agit d’un ère absolument fabuleuse pour les deux héros, le preux chevalier Green Lantern et le râleur exigeant Green Arrow. Des amis qui surmonteront ensemble des aventures à thématiques et qui, malgré leurs dissensions, graveront leur amitiés dans les épreuves.
Justement, la condition des auteurs de comics demeure affreuse aux USA. Il n’y a guère que Will Eisner qui a pu conserver la propriété de son Spirit. Jack Kirby est en passe de se faire duper, et Joe Schuster et Sieigel revendiquent toujours des royalties normales sur Superman.
Neal fait un petit tour chez Marvel. Il inaugure ainsi la versatilité chez les éditeurs. Avant les périodes d’engagements étaient longues et tous souhaitaient avoir une place stable. Si une collaboration finissait, une autre devait commencer pour une longue période chez un autre éditeur. Neal Adams va faire voler ce vieille pratique, il va travailler simultanément pour les deux éditeurs. Chez la Marvel, il va faire Avengers, la mémorable guerre Skree/Skrulls avec Roy Thomas (excellent à ce moment là), puis un run un peu fouillis sur les X-men.
Neal Adams se lasse vite des comics. Il sait que les éditeurs exploitent le talent et payent très mal en retour sans guère de droit de suite ni même sur les réimpressions. Il raconte que chez Dc, malgré son évidente pouvoir commercial, il était payé 45 $ la planche. Il s’agit d’œuvres traduites dans de nombreux pays, et qui le sont encore de nos jours !
Neal Adams va se faire rare, mais il sera toujours désiré par ses légions de fans !