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27 avril 2008 7 27 /04 /avril /2008 08:01

La cible dans l'oeil, encore un film qui ne doit rien vous dire. Il s’agit d’un long-métrage de 1967 réalisé par un bon réalisateur, Paolo Cavara. Mais l’œil sous la cible demeure un film intense, engagé, qui capture l’attention de son audience et lui propose un périple assez incroyable. 

Le début de la cible dans l'oeil se déroule dans le désert, quatre touristes ainsi qu’un réalisateur nommé Paul et son assistant jouent en pourchassant une gazelle avec leur jeep. Paul fait remarquer que la gazelle va bientôt mourir à cause de l’effort et de la frayeur et qu’il convient d’immortaliser cela. Une des passagères, Barbara, coupe les clefs du contact pour permettre à l’animal d’en réchapper. Mais lorsque vient le moment de redémarrer, l’assistant les fait remarquer qu’il n’y a plus d’essence et que le bouchon ainsi que le contenu du réservoir ont été perdus dans le désert. Tous sont donc contraints à tenter une mince chance qui consiste à tenter d’atteindre une piste. Paul demande à son assistant de ne pas perdre une miette du calvaire de la troupe, que l’on voit dépérir sous le désert. A bout de force, Paul trouve quand même le temps de demander à un homme quasi-mourant s’il échangerait sa femme contre de l’eau ! Mais une jeep arrive providentiellement jusqu’à eux. Plus tard dans l’histoire, on apprend que Paul avait lui-même orchestré cette situation avec l’aide de son assistant pour son « film » ! 

Voilà qui en dit long sur le héros du film, qui est au-delà des frontières de la raison et de toute moralité. Il veut saisir l’instant de vérité de l’âme humaine, ses souffrances et ses réactions dans des situations que la civilisation réprime. Pour cela, il va faire un périple autour du monde où il côtoiera des merveilles, des dangers extrêmes, mais aussi des situations hallucinantes. Le problème est que si son assistant lui est dévoué, Barabara le suivra guidée par une étrange fascination mêlée d’admiration et d’amour. Toutefois, après avoir réussit à éviter la mort tout en la frôlant, un des personnages va rencontrer un sort funeste… 

  La cible dans l'oeil demeure époustouflant, son propos est engagé et choc (un peu le même que Cannibal Holocaust) mais il combine introspection psychologique et dénonciation de ces reporters prêt à tout. Les motivations de Paul ne sont pas réellement le cinéma ou le journalisme, il veut graver les instants de vérité de l’homme devant les ultimes moments de son destin. Lui-même ne compte plus, seule cette quête insensée a de l’importance comme s’il était au service d’une cause supérieure, au-delà du bien et du mal. Pour cela, il demande à un moine s’il est prêt à s’immoler par le feu (comme au Vietnam où seul le cœur du prêtre fut intacte et préservé dans une urne comme la relique d’un saint).  

Il s’agit d’une dénonciation des mondo, des documentaires italiens qui, sous couvert de tout nous montrer, on alterne les pires horreurs pour monter les paradoxes de l’homme. Le plus fameux demeure le monde de chiens, mondo cane qui fut co-réalisé par Cavara, qui est quand même passé à Cannes il y a presque 50 ans. Mais la vague s’est perpétuée et elle a engendrée les Face à la mort, que j’ignore pour ma part. Le film de Cavara montre donc les travers de ce genre de production et la folie qu’elle produit sur un homme qui s’affranchit de toute les considérations éthiques afin de trouver « la vérité », quoiqu’elle lui en coûte.

    Pour jouer Paul, on a un immense acteur qui se nomme Philippe Leroy Beaulieu. Né en 1930, Philippe Beaulieu est l’un des meilleurs de sa génération : un jeu accompli, une présence physique qui occupe l’écran, et un physique athlétique. Sa filmographie demeure hallucinante, il a tourné beaucoup en France mais surtout en Italie, sa patrie de cœur.  Philippe Leroy Beaulieu demeure encore actif à son age, mieux il a tourné dans le dernier Argento, la troisième mère, et il demeure en pleine forme puisqu’il s’adonne au parachutisme, à la sculpture… Un homme étonnant qui poursuit une carrière immense et qui n’hésitait pas à tourner dans des productions modestes si le scénario était intéressant, ce qui est très estimable. 
   Enfin il y a Gabriele Tinti, Mr Laura Gemser jusqu’ à sa mort en 1991 avec qui il aura tourné en chaque occasion. Gabriele Tinti avait un physique de beau gosse mais il ne demeure pas très bien considéré, pourtant il a une filmographie incroyable et il a beaucoup versé dans le cinéma d’auteur. Un acteur à ré estimer pour lui donner la considération à laquelle il devrait avoir le droit.   

Note : L’œil sous la cible demeure un film rare, il existe dans une édition en k7 vidéo chez Poserpine puis VIP. Mondo Cane a été ressortie chez Néo Publishing dans un coffret très respectueux de l’œuvre originale. 

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