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11 avril 2011 1 11 /04 /avril /2011 07:29

Certains des lecteurs du Royaume ne connaissent parfois pas les sujets, thèmes, ou les personnes qui sont traitées ici. L'objet du Royaume a toujours été d'élargir le champ des connaissances.

Francis Saint Matin est une très grande plume, à mon sens la plus grande, qui traite de la culture populaire. Il est en effet un expert en ce qui concerne les pulps et les comics.


Collaborateur émérite et pillier de Scarce, il a livré des portraits et des bibliographies sur de nombreux artistes qui sont de tout premier ordre. Parraléllement à cela, il a été édité dans plusieurs ouvrages dont un livre sur les Pulps, ainsi qu'un second sur Bob Morane. Il a lui-même édité des ouvrages de référence sur divers sujets tels que Stan Lee, Doc Savage, les édition Atlas, Conan, les Crossovers dans les comics.

Chacun de ses ouvrages a pour trait commun d'être à la fois exhaustif et trés exigeant en terme de contenu.


Si j'écris des articles dans le Royaume des avis, c'est trés certainement grâce à mes lectures de fanzines sur les comics tels que Scarce, Heroes/D.I, Swof... Toutefois, je considère que LA référence en matière d'articles est indéniablement Francis Saint Matin.

Après une ou deux années de correspondance, Francis Saint Matin a bien voulu prendre de son temps pour répondre à mes questions. Qu'il en soit ici remercié doublement, pour l'effort demandé et pour la pertinence de se réponses.

 

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1ère partie

 

 

BA : Bonjour Francis Saint Martin, certains lecteurs de Scarce connaissent votre signature depuis de nombreuses années mais ils ignorent tout de vous. Voulez-vous bien vous présenter succinctement ? 

 

FSM : Bonjour, étant né en 1960 j’ai aujourd’hui 50 ans et exerce une profession qui me laisse espérer pouvoir faire la sieste tous les jours et lire autant que je le voudrai d’ici quelques années.

 

BA : Il semble que vous soyez un grand collectionneur de bandes dessinées, de comics, de pulps. Comment est-née votre passion ? Quelles sont les premières bd qui vous ont fait rêver et qui ont suscité votre passion ?

 

FSM : Hum, oui je suis un grand collectionneur de littérature populaire, je mesure 1m90 ! J’ai ressenti un très vif intérêt pour la bande dessinée et les littératures de l’imaginaire dès mon plus jeune âge. Abonné à six ans à Fripounet et Marisette par mes parents, j’y découvris avec ravissement les dernières bandes de René Bonnet. Déçu par son absence répétée du sommaire du journal, et sans que François Bel, trop rare lui aussi, ne pût me retenir, je me jetais dès sa parution sur la nouvelle mouture de Vaillant en 1969. Pif Gadget fut une révolution que les lecteurs d’aujourd’hui ne peuvent imaginer. La formule des récits complets emporta l’adhésion d’une foule d’amateurs même si, plus tard, elle fut galvaudée par un gadget devenu envahissant. Pif fut donc mon compagnon de jeunesse pendant quatre à cinq ans jusqu’à ce que, là aussi, la qualité baissât. Cependant, entre-temps, j’avais découvert, la même année où parut l’hebdomadaire des Editions Vaillant, un étrange petit format dans les kiosques. Fantask me fit l’effet d’une bourrasque. J’étais soufflé. Jamais ailleurs je n’avais parcouru de BD de ce genre et j’en conçu immédiatement une étrange fascination pour le pays d’origine de ces histoires.

 

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   L’Amérique était encore une contrée magique en ces années, pour les jeunes de mon âge, nourris de westerns et d’aventures d’avant-guerre. Aussi je n’avais aucun mal à imaginer que de vrais superhéros arpentaient les rues de ses mégalopoles. Encore que l’armement et les véhicules futuristes que je découvrais dans ces pages bigarrées m’apparussent un rien incompatible avec ce que je savais du monde. Mais qu’importait puisque Stan Lee m’avait ferré ! Désormais et pendant des années je lu tous les comics qui me tombèrent entre les mains, d’autant plus que j’eus vite la chance de pouvoir acheter les originaux qui étaient vendus dans les kiosques de certaines des villes de ma région.

 

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BA : Passons à votre œuvre. Votre style, ou votre « plume », est tout à fait incroyable, on a l’impression , en vous lisant, d’être le témoin direct des carrières des auteurs dont vous racontez l’existence. Comment parvenez-vous à cerner aussi bien un auteur ? Quels types de recherches avez-vous recours pour parvenir à un tel résultat ?

 

FSM : Mes collections, qui me permettent de suivre un auteur sur l’ensemble de sa carrière, facilitent mon travail. Je possède aussi de nombreux ouvrages de références. Je suis toujours à l’affût de livres qui abordent l’univers fascinant des comics ou des pulps. Les ouvrages généralistes bien sûr mais plus encore les souvenirs ou les mémoires des auteurs ou des acteurs du domaine. Le reste n’est plus qu’affaire de compilation. Il faut isoler les données relatives au sujet à traiter, les mettre en ordre et les exploiter.

 

BA : Justement, votre style demeure des plus impressionnants et des plus efficaces. On a l’impression d’être le témoin de l’évolution des artistes que vous traitez.

Comment l’avez-vous mis au point ? Privilégiez-vous une dramaturgie dans votre écriture ou aviez-vous un modèle ? 

 

FSM : Dans la mesure où je m’efforce de ne pas donner d’indications qualitatives dans mes articles, seule la carrière des auteurs m’intéresse, je dois compenser cette apparente froideur stylistique par autre chose. Les auteurs que j’aborde sont certainement, pour la plupart, des génies dans leur domaine, mais ce sont, avant tout des êtres humains. Même s’ils nous firent rêver, ce ne fut jamais autrement qu’en essayant de gagner leur vie. Je pense qu’il ne faut pas oublier cet aspect des choses. Mais, en revanche, cette condition autorise toutes les faiblesses et les grandeurs humaines. Ces gens ne ressemblent pas à Zeus, magistralement installé au sommet du Mont Olympe, ce sont des humains industrieux qui s’affairent pour gagner leur vie. Je relate ainsi leur carrière en montrant les choix ou les contraintes qui les ont menés à aborder un travail ou une série. Je m’attache ainsi, avant tout, à montrer que ce sont des hommes.

   Ma volonté délibérée de retracer les carrières chronologiquement permet aussi d’accompagner un auteur vers la maturité. Ce procédé permet de conserver un fil conducteur pratique alors que l’on traite un domaine où les dates, les titres d’œuvres et de comics ou les noms d’autres intervenants abondent.

   Je ne connais pas tellement l’œuvre de Jean Mabire même si j’ai lu plusieurs de ses livres mais je suppose que son succès provient aussi de son enthousiasme et de sa réelle connaissance des thèmes qu’il aborde.

 

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BA : Parlons de Scarce, vous êtes devenu, avec les années, un des plus fidèles soutien historique de la revue. Êtes-vous attaché à cette revue qui a su défendre avec passion le médium comics ?

Quelle est votre perception de cette belle aventure à laquelle vous contribuez sans relâche ?

 

FSM : Scarce fut lancé par Frédéric Blayo et j’y fus associé dès le deuxième numéro, si ma mémoire est bonne.

   Frédéric était alors un jeune homme enthousiaste qui gravitait dans le petit monde de la BD et de la SF. Passionné de comics, grand collectionneur, il souffrait de l’absence d’un vrai journal sur ce sujet en France et décida de se lancer lui-même dans l’aventure de l’édition d’un tel fanzine. Un autre que lui, et il y en eut, se serait contenté de publier une modeste brochure photocopiée mais pas lui. Prenant exemple sur PLG, il lança un vrai magazine qui, en peu de numéros, s’imposa dans le milieu. Plus tard des dissensions internes provoquèrent son départ ainsi que celui d’autres rédacteurs. Dans la mesure où je résidais loin de Paris où tout le monde se trouvait j’échappais à cette tourmente et continuais ma collaboration à un magazine que j’apprécie contre vents et marées.

   Scarce n’est cependant pas la revue que j’idéalise car elle aborde de nombreux sujets, ou présente des rubriques, qui ne me concernent pas mais je dois reconnaître que c’est grâce à la volonté réaliste de ses rédacteurs en chef successifs qu’elle existe encore. Si l’on veut qu’une revue soit pérenne il faut savoir concocter un savant brouet avec l’ancien et l’actualité. Je n’aurai pas su y parvenir moi-même et je ne peux, une fois de plus, que tirer mon chapeau à ses responsables.

   Quant à Frédéric Blayo qui s’est éloigné des comics, il est aujourd’hui à la tête de deux librairies de qualité que les amateurs d’histoire ne peuvent ignorer, CLIO à Paris et à Montolieu.

 

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BA : Maintenant les éditions de l’Hydre. Pourquoi le nom de cet animal qui a plusieurs têtes qui repoussaient ?

Quelles furent vos ambitions en élaborant des ouvrages sur des thèmes, auteurs que pratiquement vous seul traitez en France ? 

Combien de temps nécessite la mise au point d’un ouvrage comme celui, à titre d’exemple, de Stan Lee ?

 

FSM : Le nom des éditions de l’Hydre est symbolique. Comme les têtes de l’animal fabuleux qui repoussaient toujours, mon intérêt pour la littérature populaire pouvait se porter d’un domaine à l’autre. S’il semblait qu’un genre fût délaissé pendant des années, c’était pour mieux renaître. De la Bd au fantastique, du roman de SF au western… ainsi de suite, sans exclusive. Toutes les têtes de l’Hydre étant toutes les facettes de cette littérature fascinante.

 

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Je commençais par publier des fanzines de BD, comme tout le monde dans les années 80, puis des pastiches, de la SF, des livres plus sérieux, des fac-similés ; un peu de tout jusqu’à ces dernières années où, disposant de moins de temps, je résolus de publier les livres qui me faisaient le plus envie. Avec pour seule contrainte qu’ils me plurent sans m’inquiéter de leur devenir commercial. Quand on espère des ventes aux alentours de la dizaine d’exemplaires, il n’y a aucune contrainte à respecter et si l’on en vend cinquante c’est un succès !

   Par contre, ces ouvrages étant relativement pointus, il est difficile de répondre à la dernière partie de votre réponse. C’est à la fois un travail de tous les jours et de quelques mois. Le livre sur Stan Lee n’est pas venu en quelques jours. Il synthétise des années de lecture des comics Marvel, mais aussi des autres éditeurs de la même période ainsi qu’un bon nombre d’articles et d’interviews des acteurs du domaine. Ainsi si sa rédaction ne prit que peu de temps, sa préparation me demanda des années…

 

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commentaires

D
<br /> Félicitations pour cette excellente interview !<br /> <br /> Aprés des années de lectures des articles de l'exigeant Francis Saint Martin, je lis enfin une interview qui lui ait dédiée.<br /> <br /> Il est vrai que l'on ne connait que ses textes mais rien ou si peu de lui.<br /> <br /> Bravo !!!<br /> <br /> <br />
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